Si un·e auteur·ice d’agression dispose d’importants capitaux financiers et sociaux, d’un soutien médiatique ou politique, alors le seul moyen pour l’atteindre peut être le call-out. L’impact réel de ce genre de call-out peut être très faible car souvent, ces personnes bénéficient de soutiens bien ancrés dans le système capitaliste, patriarcal, racial. Toutefois, cela a pour mérite de remettre en cause leur impunité totale et de faire évoluer les mentalités. Ici, le call-out désigne une dénonciation publique nominative visant à interpeller le monde médiatique, souvent quand la justice étatique est/se rend impuissante, afin que la « foule » se substitue à celle-ci et fasse pencher la balance face au système hégémonique. Nous ne pouvons que soutenir, en tant que queer et féministes anticapitalistes, ce genre de démarche.
A nos yeux, des problèmes propres à nos communautés émergent quand on utilise le call-out en milieu queer.
Nous avons déjà parlé du fait que les différences de capitaux sociaux, financiers, matériels entre personnes queer et cis-hétéo entrainent des conséquences au call-out d’une ampleur tout autre sur la vie des queer call-outé·e·s que sur celles des cishet blancs riches (cf post « call-out » et « cancel culture »).
Au de-là de ça, nous pensons que le call-out est un problème parce qu’il est un prétexte aux maltraitances communautaires. Le problème n’est pas le call-out en soit, c’est ce qui est fait en son nom. Le problème est moins la question de visibiliser des violences, mais plus que nos communautés doivent apprendre à réagir à ces visibilisations autrement. Pour éviter la maltraitance d’une personne accusée de violences par un groupe, ce qui est urgent est d’arrêter de réagir comme s'il fallait punir et exclure les personnes qui ont commis des violences. Oui, visibilisons les violences dans nos milieux. Parlons-en car nos communautés n’en sont pas exemptes. Mais se déchaîner contre des individus est contre-productif à ce processus de visiblisation.
Ce qui est important est de réfléchir sur le système autour de ces violences : se questionner sur la place de la “drague” et de la sexualité dans nos communautés, sur la « course aux dominations » ou à la “ radicalité “ dans les milieux militants, la prise en charge adaptée des personnes sous l’emprise de stupéfiant ou d’alcool, l’importance des capitaux sociaux, physiques, financiers dans les processus de sociabilisation…
Cette liste est non exhaustive mais travailler dessus demande effectivement plus de travail qu’un simple call-out. Il est néanmois primordial.