« Dans l’ensemble, nous avons tendance à être plus conscient·e·s des torts commis à notre encontre que des torts que nous commettons envers les autres. Nous sommes plus dangereux·ses lorsque nous nous sentons lésé·e·s, car nous nous sentons plus en droit de porter un jugement, d’être cruel·le. Plus nous nous sentons légitimes, plus nous devons faire attention à ne pas reproduire les modèles de l’industrie de la justice, les suppositions de l’état carcéral, la logique de la guillotine. Encore une fois, cela ne justifie pas l’inaction ; c’est simplement pour dire que nous devons procéder de manière plus critique précisément au moment où nous nous sentons les plus justes, de peur que nous finissions par assumer le rôle de nos oppresseurs.
Lorsque nous nous considérons comme luttant contre des êtres humains spécifiques plutôt que contre des phénomènes sociaux, il devient plus difficile de reconnaître les façons dont nous participons nous-mêmes à ces phénomènes. Nous extériorisons le problème en le considérant comme quelque chose d’extérieur à nous-mêmes, en le personnifiant comme un ennemi qui peut être sacrifié pour nous purifier symboliquement. Pourtant, ce que nous faisons au pire d’entre nous finira un jour ou l’autre par être fait au reste d’entre nous. »